Les éditions ESF ont eu la gentillesse de m'envoyer un exemplaire de "La pédagogie Montessori en maternelle" de Marguerite Morin. Je souhaitais pouvoir lire ce livre pour vous en faire un compte-rendu et évaluer son intérêt.
Un livre différent
Dans la grande jungle des livres ayant trait à Montessori, celui est différent: il s'adresse à un public en particulier, celui des enseignants de maternelle en système classique et il est rédigé par une enseignante qui expérimente elle-même ce dont elle parle. C'est donc un livre très concret et qui aborde des questions très spécifiques aux enseignants de l'Education Nationale.Les premières pages abordent de manière un peu rapide l'historique de la méthode et les 4 plans de développement ainsi que la validation de la méthode par les résultats de la recherche en neurosciences.
Là où le livre devient vraiment intéressant, c'est dans la 2ème partie: "la préparation". Même si je n'adhère pas à tous les choix de l'auteur, cette partie est vraiment un plus pour un enseignant. Elle rend les choses concrètes sans cacher la difficulté de la mise en place.
La 3ème partie: "La mise en place concrète" permet aux enseignants de mieux se représenter ce que peut être le quotidien montessorien dans une classe. Il s'agit certes d'un quotidien montessorien très adapté qui reste énormément dans les limites de l'Education Nationale, mais ça peut-être une manière rassurante d'introduire progressivement la philosophie montessorienne dans sa classe sans se mettre en danger vis à vis de sa hiérarchie.
Tel qu'il est proposé, le résultat sera forcément différent de ce que peut vivre un enfant dans une école purement montessorienne mais c'est déjà un grand pas par rapport aux pratiques habituelles et c'est mieux que rien.
J'apprécie que Marguerite Morin revienne régulièrement sur le fait que l'on ne change pas le fonctionnement de sa classe si on ne commence pas par se changer soi-même et que ce changement est un processus qui prend du temps.
Cette 3ème partie offre de nombreux petits détails pratiques qui permettront aux enseignants de gagner du temps. Néanmoins sa vision de l'évaluation dans le dernier chapitre de cette partie me semble aller totalement à l'encontre de Montessori. Marguerite Morin propose de valider les acquis en demandant à l'enfant de refaire le matériel devant elle. Pour moi, cette pratique, en plus d'être chronophage, sape totalement le travail sur l'auto-évaluation. L'adulte évalue sans cesse, mais sans en faire part à l'enfant et c'est ainsi que l'enfant peut développer une vision juste de son travail.
Un énorme travail au services des enseignants
Le plus gros du travail de Marguerite Morin ressort dans la 4ème partie dans laquelle elle présente un très grand nombre d'activités montessoriennes dans la terminologie de l'Education Nationale pour les relier aux référentiels des compétences et connaissances du programme.Elle donne aussi des exemples de programmation annuelle qui peuvent rassurer un inspecteur inquiet et pas très au fait de l'inutilité totale de faire ce genre de chose en pédagogie Montessori.
Quelques exemples de déroulements de séances à la sauce Education Nationale viennent compléter cet énorme travail et pourront aider les collègues qui veulent continuer à transcrire leurs séances de travail montessoriennes dans ces documents proprement indigestes que leur demande leur hiérarchie.
Etant elle-même chargée de formation, l'auteur nous propose des tableaux de programmation exemplaires. Soit-dit en passant, quand on voit ce que l'éducation nationale exige comme travail administratif de la part de ses enseignants, on s'étonne moins des difficultés et du ras le bol des collègues. Le système est entré dans l'ère de la planification, de l'évaluation et de la trace écrite à tout va et c'est tout de même une tendance difficilement compatible avec une vision Montessorienne. Je n'en admire que plus les collègues qui tentent de concilier Montessori avec les exigences de leur service, des programmes et des hiérarchies...
La 5ème et dernière partie est celle qui me paraît la moins utile même si elle attirera peut-être des enseignants. L'auteur y propose en effet un grand nombre de fiches de présentation de matériels et activités. Le point le plus intéressant de ces fiches est de faire un lien entre chaque présentation et des points du programme. Pour le reste, les descriptions des activités sont forcément très courtes et ne peuvent remplacer, à mon avis, une véritable formation. Marguerite Morin est d'ailleurs honnête sur ce point et précise qu'elle a pris le temps de se former et de s'entraîner.
Dans cette partie, ce sont une bonne cinquantaine de fiches de présentation qui sont proposées. Nul doute que pour une personne pas du tout formée, ce genre de document soit très indigeste à lire et à assimiler pour mettre en pratique.
En plus des fiches de présentation, l'auteur propose dans cette partie des tableaux de progression ou d'activités selon l'âge. Là encore, le choix retenu est très conforme aux attentes de l'Education Nationale de même d'ailleurs que dans les choix des présentations retenues puisqu'un grand nombre d'activités du 3-6 ans ne sont pas évoquées, sans doute en raison du fait qu'elles dépassent les programmes.
En conclusion
Bien que ce livre présente une version un peu trop "rognée" de Montessori à mon goût, j'encourage toutefois les enseignants intéressés par cette pédagogie à le consulter. Ils y trouveront de nombreux détails tirés de l'expérience concrète de Marguerite Morin et il peut s'avérer très rassurant pour tous ceux qui veulent se lancer mais craignent la réaction de leur hiérarchie: le livre leur donnera des pistes pour se lancer tout en étant "couverts" vis à vis de leurs obligations professionnelles.Bref, un livre utile, à compléter par une solide formation Montessori en parallèle pour être aussi à l'aise devant les enfants que devant l'inspecteur!
Enseignante en élémentaire j'ai acheté le livre pour l'élémentaire et je suis contente de mon achat! J'en parle dans mon blog aussi.
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