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mercredi 14 mai 2008

Langage




Il y a environ 8 mois de cela, alors que je ne connaissais rien de la pédagogie Montessori, Clémence a commencé à s’intéresser aux lettres.
Cela faisait longtemps que le frigo s’ornait de magnets récupérés dans des paquets de petits suisses et qu’elle jouait avec, mais tout d’un coup, elle s’est mis à me demander “C’est quoi, ça?” en désignant la lettre et non plus l’animal. 
Sa question venait juste au moment où elle a commencé à nous montrer des choses écrites dans le bus ou dans la rue en nous disant:”Ça, c’est des lettres!”
Donc, quand j’ai répondu “C’est une lettre.”, j’ai eu immédiatement droit à “C’est quoi, comme lettre?” Et là, comme j’étais occupée à autre chose dans la cuisine, je ne me suis pas posé la question 3 secondes et j’ai immédiatement répondu: “C’est un “pé” (un “bé”, un “dé”, un “èl”....).” 
Je n’imaginais pas un seul instant qu’à 2 ans et demi elle allait retenir les lettres! Et voilà qu’en quelques semaines, elle était capable de reconnaître presque toutes les lettres et de donner leur nom...

Pourtant, j’ai moi-même appris à lire avec une méthode phonétique et gestuelle sans apprendre le nom des lettres mais leur son. J’aurais pu me douter que ce n’étais pas la meilleure chose à faire...

Ce qui est fait est fait et depuis un certain temps déjà, j’ai attiré l’attention de Clémence sur le son des lettres. Elle avait retenu “ça c’est un “pé” comme dans “papa” et “Pauline””. J’ai donc essayé de détacher un peu plus la prononciation de la 1ère lettre de ces mots-références. Puis j’ai isolé le son lui-même.
Ça, c’était avant même que je découvre comment les enfants apprennent à écrire puis à lire dans la méthode Montessori. (voir ce lien pour une jolie explication vécue)  J’avais déjà compris que l’association signe grapgique-nom de la lettre n’aiderait pas beaucoup Clémence dans son désir évident d’apprendre à lire.

Puis, j’ai découvert la méthode et j’ai fabriqué mes lettres rugueuses. J’ai présenté assez vite 3 lettres à Clémence car son désir de lire ne s’était pas éteint. Bien au contraire, elle est même venue me voir un jour en me disant: “je veux que tu m’apprennes à lire avec les lettres rugueuses”.
Je me suis donc exécutée, mais les lettres rugueuses sont un instrument d’apprentissage de l’écriture en même temps que du son des lettres. Et là, la main de Clémence n’était pas prête à suivre le tracé sur la planchette.
J’ai donc rangé mes planchettes en me disant que je m’était trompée et qu’il était trop tôt pour l’apprentissage de l’écriture/ lecture...

Cependant, j’avais déjà pratiqué le jeu "Je devine"s avec elle et cela avait bien marché. J’ai gardé cette activité, d’autant qu’elle se pratique très facilement à peu près n’importe où. Mais régulièrement, Clémence revenait au nom de la lettre. Normal, sans doute puisque c’est par là qu’elle avait commencé son apprentissage.
Quand je lui demandais de trouver le légume qui commence par (le son) “t”, elle me disait “Tomate! Tomate, ça commence par “té” “. Je disais alors: “Oui, tu viens de dire le nom de la lettre, mais pour apprendre à lire, ce qui nous intéresse, c’est le son de la lettre.”

Et ce soir, je crois qu’il s’est passé quelque chose...
Nous goûtons les 1ères pêches. 
Clémence:”Ça commence par quoi, “pêche”?” 
Moi: “Ça commence par “p”.” (le son)
Clémence: “Pêche, ça commence par “pé”!”
Moi:”Oui, ça commence par le son “p” de la lettre “pé”.”
Puis je prends la corbeille et l’invite à trouver les 2 autres fruits qui commencent par le son “p” (pomme et poire). Je dis aussi le son qui commence les bananes, l’orange et l’avocat.
Pauline a visiblement besoin qu’on la couche avant que nous mangions nos pêches et Clémence m’accompagne dans la chambre de sa soeur. Nous parlons toujours de lettres. Nous en arrivons à “d”, je cite plusieurs exemples et elle ajoute toute seule “doudou”! Puis nous trouvons plusieurs mots qui commencent par “c” (“k”) mais sans évoquer le canard.
Comme Pauline a besoin d’être seule pour téter, je demande à Clémence d’aller m’attendre à la cuisine (son papa est de sortie ce soir). Et dans le silence de la chambre, j’entends Clémence soliloquer à la cuisine: “pêche, p, p, pêche.... k, k, k .... canard!.... k, k,.... (des pas qui courent, la porte qui s’ouvre d’un coup et un visage rayonnant) Maman! Canard ça commence par “k”!! Et pêche ça commence par “p” et Pauline aussi!”

Et voilà! Pour la première fois aujourd’hui, Clémence n’est pas passée par le nom mais par le son de la lettre! C’est un grand pas qu’elle vient de faire. Même si sa main n’est pas encore tout à fait prête pour les lettres rugueuses (mais les tablettes rugueuses qu’elle pratique pas mal en ce moment vont sûrement l’aider), elle vient de faire un grand progrès dans l’analyse des mots. Dans quelques temps, elle sera capable de décomposer tous les sons d’un mot court et alors, elle pourra l’écrire à l’aide de l’alphabet mobile. Nous n’en sommes pas encore là, mais je crois que je ferai bien de penser à m’activer à la fabrication dudit alphabet mobile. Ça pourrait arriver plus vite qu’on ne le pense...

Aujourd’hui, j’ai mesuré une fois encore l’intensité du bonheur d’un enfant qui découvre et qui réalise qu’il vient de progresser. Et quel bonheur de pouvoir être le spectateur de ce” travail intérieur”!

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