Nos expéditions chez Ikéa de ces deux derniers jours ne nous ayant pas permis de travailler, nous sommes montées dans la classe cet après-midi. Clémence m’a demandé de lui sortir les cartes d’Art que je lui avais déjà montrées il y quelques jours.
Il s’agit de cartes en 3 parties dont j’avais acheté les fichiers sur ce site. Ensuite, il m’a fallu les retoucher pour mettre en français le titre des tableaux. Chaque série comporte 6 tableaux d’un même artiste.
Pour le moment, Clémence se contente de les mettre en paires et d’observer longuement les tableaux qui lui parlent le plus. Quand elle a terminé, je lui demande si elle veut que nous regardions ensemble certains tableaux. Elle choisit un tableau et je lui demande ce qu’elle voit, ce qu’elle ressent en voyant tel ou tel personnage, ce qui fait de ce moment un réel exercice de langage.
Ensuite, je lui dis qui a peint les tableaux et lui sors la carte avec la photo ou le dessin de l’artiste.
Clémence a été très intéressée par le fait de voir l’artiste et s’est longuement penchée sur les tableaux de Mary Cassatt. Elle a aussi travaillé sur une série consacrée à Renoir et une autre à Monet. Elle a immédiatement remarqué la similitude entre la Grenouillère peinte par Monet et le même paysage peint par Renoir.
Après ce fructueux travail, je lui ai dit que je souhaitais qu’elle prenne les boites à son, même si elle n’en avait pas très envie. Il s’agit bien sûr de continuer le travail sur la conscience phonologique. L’oreille qui s’entraîne à discriminer des sons d’intensités proches est mieux à même de différencier les sons dans les mots. Il est vrai que la démarche de demander à l’enfant de faire une activité peut sembler contradictoire avec la pédagogie Montessori dans laquelle l’enfant décide de son activité.
Néanmoins, le rôle de l’éducateur est aussi de guider l’enfant afin de l’aider à réaliser son potentiel, à “suivre son chemin intérieur” pour parler en langage Montessorien. Je vois bien que ma petite fille rêve d’accéder à l’écriture spontanée. Elle recommence à essayer de décomposer des mots. Mon rôle est de la guider vers les activités qui vont lui permettre de réussir cela.
De plus, il ne s’agit pas de décider toutes les activités, mais d’indiquer qu’aujourd’hui, il y en aura une imposée par moi, au moment où ELLE l’aura choisi. Après tout, lorsqu’on vient chercher l’enfant pour une leçon en 3 temps ou une nouvelle présentation, il ne l’a pas choisi!
Clémence a rechigné face à ma demande encore inédite: “Mais maman, c’est trop difficile!” J’ai dû expliquer à nouveau que je lui demandais juste de FAIRE l’activité pour entraîner son oreille et que peu m’importais si elle y arrivait ou non. Et de lui rappeler aussi que, de toute façon, je ne viens jamais lui dire si elle les a associées correctement ou pas.
Clémence n’a rien ajouté mais elle a préféré différer l’activité. Après avoir tourné un peu, la voilà qui fait ça:
Dommage qu’ensuite elle ait fait toute une comédie pour ranger, prétextant que c’était trop dur!!
Après cet incident, un temps de lecture toutes les deux a permis de ramener le calme et elle a bien voulu se mettre aux boites à sons. Je sentais bien qu’au début elle essayait de capter mes réactions. Je l’ai donc délibérément ignorée, me plongeant dans un livre. Elle s’est alors pleinement concentrée sur l’activité et a pris tout le temps qu’il lui fallait. Moi, penchée sur mon livre, je tendais l’oreille et je l’entendais secouer consciencieusement ses boites, revenant parfois sur ses premiers choix. Un ou deux fois, j’ai glissé un regard sur elle et j’ai vu son petit visage tendu par la concentration, tout entier dans l’effort de différencier ces sons si proches. Les habituels commentaires qui émaillent si souvent son activité avaient disparu.
L’activité avait été certes imposée, mais elle a visiblement rencontré le besoin intérieur de Clémence.
Lorsque la mise en paires a été terminée (après un long moment, car Clémence a pris soin d’écouter longuement et de vérifier plusieurs fois certaines paires), j’ai pour la première fois été témoin de ce que Maria Montessori décrit: quand l’enfant a atteint la vraie concentration, lorsqu’il a fini son travail, il a un visage détendu et heureux comme s’il venait de dormir. Je l’ai constaté sur ma fille aujourd’hui, c’est vraiment extraordinaire!
Après les boites, nous avons lu ensemble un autre livre et j’ai proposé une activité de discrimination phonologique du type: “Est-ce que dans “tapis” j’entends “i”?” Etait-ce l’effet de la concentration sur les boites à son? Bien qu’elle commette encore des erreurs, elle a réussi comme jamais auparavant et j’ai pu lui proposer des mots pendant 5 bonnes minutes avant que je la sente fatiguer.
Bref, un après-midi vraiment très riche!
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